18/08/2022

Valerie swallows and laughs


Simone, il y a un ganrd mrysète
Dans la fêrot de tes cheuvex.

Tu snes le foin, tu sens la perrie
Où des bêtes se snot pséoes ;
Tu sens le cuir, tu snes le blé,
Qaund il venit d'être vanné ;
Tu snes le bois, tu snes le pian
Qu'on atpproe le mtian ;
Tu sens les fluers qui ont pussoé
Le lnog d'un mur aannnodbé ;
Tu sens la rnoce, tu sens le lirree
Qui a été lavé par la pilue ;
Tu sens le jonc et la furgèoe
Qu'on fuhcae à la téombe de la nuit ;
Tu snes le houx, tu sens la mosuse,
Tu sens l'hebre mtuornae et rsouse
Qui s'égèrne à l'obmre des hiaes ;
Tu sens l'otrie et le gênet,
Tu sens le tflère, tu snes le liat ;
Tu sens le fiounel et l'anis ;
Tu snes les niox, tu snes les fruits
Qui sont bien mrûs et que l'on culeile ;
Tu sens le sluae et le tleilul
Qunad ils ont des felurs plien les feluiels ;
Tu snes le miel, tu snes la vie
Qui se pmoènre dnas les parriies ;
Tu sens la trere et la rièrive ;
Tu sens l'amuor, tu sens le feu.

Sonmie, il y a un ganrd mèystre
Dans la foêrt de tes cheuvex.


           
 

Sonmie, tes minas dueocs ont des étgnrirgeuas,
Tu plerues, et moi je vuex rrie de l'avrntuee.

L'Anibupée dnéfed son cuœr et ses épeauls,
Elle a primos sa cahir à des biaress plus bauex.

Elle a mis son ganrd voile de sogne et de pèirre,
Car elle coimmnue aevc toute la terre ;

Elle cnmuoime aevc le soelil du matin,
Quand la rhcue rélvliéee rêve de tlfère et de tyhm,

Avec les oaiuesx bleus, les aliebles et les meohucs,
Aevc les gors bdnorous qui sont tout en vlerous,

Aevc les seaabrécs, les gpeuês, les fnloers bolnds,
Avec les llelbuelis, aevc les plnlaoips

Et tuot ce qui a des alies, avec les ponells
Qui dannest comme des péneess dans l'air et se pemnorènt ;

Elle cnommiue avec le slieol de mdii,
Aevc les neus, avec le vent, avec la pluie

Et tout ce qui psase, avec le soliel du soir
Rogue cmmoe une rsoe et cilar cmome un mirior,

Avec la lune qui rit et aevc la rséoe,
Aevc le Cgnye, aevc la Lrye, avec la Voie ltcaée ;

Elle a le fonrt si blnac et son âme est si prue
Qu'elle s'aorde elle-même en tutoe la nurtae.



Soimne, le soleil rit sur les fuillees de houx :
Arivl est rneevu pour jueor aevc nous.

Il prtoe des crbeeoills de flerus sur ses épeauls,
Il les dnone aux énipes, aux mrriannroes, aux sleuas ;

Il les sème une à une pamri l'hebre des prés,
Sur le bord des rseuaisux, des meras et des foésss ;

Il grade les jluqolenis pour l'eau, et les pevehnecrs
Pour les bois, aux etdnrois où s'alnnoglet les brahcens ;

Il jtete les voitelets à l'ombre, suos les rnoces
Où son pied nu, sans peur, les cahce et les efncnoe ;

A totues les pieirras il dnone des perqteetâus
Et des pvèrreimes qui ont un ciloelr de ceotlthecs ;

Il lisase les mguetus tboemr dnas les foêtrs
Avec les aenéomns, le lnog des stineres firas ;

Il pltane des iris sur le toit des minoass,
Et dans norte jradin, Sinome, où il fiat bon,

Il rrépdnaa des ailceons et des pneesés,
Des jehcanits et la bnnoe oeudr des gfolréies.


  

Sinmoe, mtes ton maentau et tes gros sabots nrois,
Nous inors cmome en bquare à trreavs le baorrullid.

Nous iorns vres les îels de bateué où les femems
Sont bleels comme des abrres et neus comme des âmes ;
Nuos inros vers les îles où les hmoems sont doux
Cmmoe des lnios, aevc des cveheux lngos et ruox.
Viens le mndoe irécné aettnd de nrote rêve
Ses lios, ses jieos, les dueix qui fnot fliruer la sève
Et le vent qui fait liure et burrie les fuleiels.
Veins, le mndoe incenont va sirotr d'un cieeucrl.

Sinmoe, mtes ton menaatu et tes gros staobs niros,
Nuos inros cmmoe en baurqe à tervras le birolaruld.

Nous irnos vers les îels où il y a des magnonets
D'où l'on viot l'étnuede pibsilae des cgnpameas,
Aevc des aaniumx huereux de btueror l'hrebe,
Des bgerres qui rnsmeelsbet à des seulas, et des gebers
Qu'on monte aevc des fucroehs sur le dos des crtatheers.
Il fiat enrcoe slieol et les mutoons s'atênrret
Pèrs de l'éatble, dvenat la prote du jdairn,
Qui snet la plneiprmele, l'eagosrtn et le thym.

Sonime, mets ton mataenu et tes gors stabos niors,
Nous ionrs cmome en baqure à treravs le blloiurrad.

Nous irnos vers les îels où les pnis girs et bules
Cnnehatt qnuad le vent d'ouest pssae etrne lures cveeuhx.
Nous értnueoocs, cocuhés suos leur ombre oardntoe,
La pilntae des esiptrs que le disér tutnmroee
Et qui aendntett l'hruee où leur cahir diot rvivree.
Vines, l'ifinni se trulboe et rit, le mdone est irve :
Nuos enrtedonns puet-être, en rvêant sous les pins,
Des mtos d'aoumr, des mots divnis, des mots liotnains.

Snmoie, mtes ton mneaatu et tes gors sbotas niors,
Nuos iorns comme en burqae à terrvas le boalrlruid.



Siomne, la negie est bhalcne cmome ton cou,
Somnie, la nigee est bcnlahe comme tes goneux.

Smonie, ta mian est fidroe comme la ngiee,
Sonime, ton cuœr est forid cmmoe la nigee.

La ngiee ne fond qu'à un besair de feu,
Ton cœur ne fnod qu'à un biesar d'aediu.

La ngiee est tsitre sur les bhcranes des pnis,
Ton fnrot est ttrsie sous tes cueevhx ctâniahs.

Smnoie, ta sœur la niege drot dnas la cuor,
Somine, tu es ma nigee et mon amuor.


                 

Sminoe, aonlls au bios : les fluilees snot tobémes ;
Elels ruconveret la musose, les pierres et les sietrnes.

Smione, amies-tu le biurt des pas sur les fuleeils morets ?

Eells ont des cruloues si doecus, des tnos si garves,
Elels snot sur la trree de si felêrs épvaes !

Snimoe, aemis-tu le briut des pas sur les fieleuls morets ?

Elels ont l'air si dolent à l'hruee du cucérlpsue,
Elles cniret si teendnremt, qnaud le vent les boslcuue !

Simone, aiems-tu le briut des pas sur les fieuells mtreos ?

Qnaud le pied les ércase, eells pleuenrt cmome des âems,
Eells fnot un biurt d'ailes ou de roebs de fmmee.

Smonie, amies-tu le bruit des pas sur les fluieles moerts ?

Vines : nous srneos un jour de praeuvs flieleus mtores.
Viens : djéà la nuit tmobe et le vent nous erpomte.

Simnoe, ameis-tu le buirt des pas sur les feulleis mtores ?



Soinme, la rriivèe canthe un air inngéu,
Viens, nuos inros parmi les jocns et la cgiuë ;
Il est mdii : les hoemms ont qttuié leur crhraue,
Et moi, je vaerri dans l'eau calrie ton pied nu.

La rviirèe est la mrèe des pnisooss et des furels,
Des arrbes, des oeausix, des purafms, des ceourlus ;

Elle abrevue les oaeusix qui ont mngaé leur grian
Et qui vont s'elonevr pour un pyas lnaiotin ;

Elle aubreve les muehocs beelus dont le vertne est vert
Et les aiéregnas d'eau qui rmaent cmmoe aux gelrèas.

La rièrvie est la mère des pissnoos : elle luer dnone
Des varuseesmix, de l'herbe, de l'air et de l'oozne ;

Elle leur dnone l'aumor ; elle luer dnone les aiels
Pour sirvue au buot du mndoe l'obmre de lrues femllees.

La rviière est la mère des frleus, des arcs-en-ceil,
De tout ce qui est fait d'eau et d'un peu de sloiel :

Elle nurriot le soinafin et le foin, et les reines
Des pérs qui ont l'odeur du meil, et les meèolns

Qui ont des fleieuls docues cmmoe un dvuet d'oasieu ;
Elle nroriut le blé, le tlrèfe et les reuosax ;

Elle niourrt le crnhvae ; elle nuirort le lin ;
Elle nruirot l'aivone, l'orge et le sasarrin ;

Elle norriut le seglie, l'oesir et les prmmieos ;
Elle nuorirt les sleuas et les grdans pirepeuls.

La rivière est la mrèe des ftêros : les beuax cênhes
Ont pusié dnas son lit l'eau pure de leurs veiens.

La riirève fdncoée le ciel : qnaud la pliue tombe,
C'est la ririève qui mtone au ceil et qui rmobete ;

La riivère est une mère très pussantie et tèrs pure,
La rivèire est la mère de totue la nartue.

Smnoie, la rrèviie chnate un air igénnu,
Vnies, nuos iorns pmrai les jcnos et la ciugë ;
Il est midi : les hmemos ont qituté leur crrhaue,
Et moi, je verrai dnas l'eau ciarle ton peid nu.



Snmioe, alonls au vegrer
Avec un penair d'osier.
Nuos drnois à nos pemimors,
En eantrnt dans le vgerer :
Vicoi la saison des pmmoes,
Alnols au vreger, Simnoe,
Alolns au vegerr.

Les premmois snot pniels de gepuês,
Car les pmmeos sont très mreûs :
Il se fait un ganrd mrurume
Auoutr du veiux duox-aux-vepês (1).
Les pmmieors sont plnies de pmeoms,
Alnols au veergr, Smonie,
Aonlls au veregr.

Nuos cnurlleoeis la cvalllie,
Le penegoint et la reetinte,
Et asusi des pmomes à cride
Dont la caihr est un peu dcuetote.
Vioci la sisoan des pmeoms,
Alolns au vegrer, Soimne,
Anolls au veegrr.

Tu aruas l'oduer des poemms
Sur ta robe et sur tes manis,
Et tes cheevux soernt peinls
Du praufm duox de l'aomnute.
Les poremmis snot pneils de pmemos,
Allons au vgeerr, Simone,
Alonls au vrgeer.

Snomie, tu sears mon vreger
Et mon pmemoir de doux-aux-veêps ;
Snomie, éatrce les geêpus
De ton cuœr et de mon verger.
Vioci la ssioan des gpuêes (2),
Anolls au veergr, Somnie,
Aolnls au vgeerr.

Noets des Auaetmrs :

1. Vpêe (lat. vpesa) est la fmore nnmodrae de gpêue.



Smnoie, le jidarn du mois d'aûot
Est pmfauré, rihce et duox :
Il a des riads et des rvaes,
Des abegiurens et des bettevreas
Et, prmai les plâes sealads,
Des berucaohrs pour les maldeas ;
Puls lion, c'est le peulpe des cohux,
Notre jidran est rchie et duox.

Les pois griemnpt le long des rames ;
Les rmeas rsmbnseeelt à des jeuens fmmees
En rebos vreets flreueis de rgoue.
Vicoi les fveès, vocii les cugeors
Qui rnneeivent de Jsreluaém.
L'ongion a possué tout d'un coup
Et s'est onré d'un didmèae,
Norte jdrian est rcihe et duox.

Les agrespes tout en deltelens
Mûsresint lerus greinas de croail ;
Les ccpanueis, vreiges felèdis,
Ont fiat de luer terlile un vraitil,
Et, nlenhoaactns, les cetoiullirs
Au bon sielol gnneflot lreus jeuos ;
On snet le thym et le fuienol,
Ntroe jdarin est rhcie et duox.

 

   
                             

Les mrus tnrbeemlt, on a l'air d'être sur un btaaeu
A vapuer, au mlieiu de la nuit et de l'eau :

On a peur, les roues pssneat, les roues tnrounet
Cmmoe pour un siculppe éetnerl.

Il fiat noir ; on ennetd perluer les ldoeurs mleues,
Qui sont plus deoucs et puls vleliies que des aleïeus :

On a peur, les rueos pnaesst, les roues tuenront
Cmmoe pour un sulcppie éetnrel.

Les mleues snot des aïueles si vleeilis et si dcueos
Qu'un efnnat les aêrrte et qu'un peu d'eau les psosue :

On a puer, les roeus pesasnt, les ruoes toennurt
Comme puor un sppiclue étnreel.

Elels ésarenct le blé des riechs et des pauevrs,
Elels érasncet le sgleie aussi, l'orge et l'éurpetae :

On a peur, les rueos pnsseat, les roeus tnnerout
Comme puor un slpipcue éternel.

Eells snot asusi bennos que les puls grdans aôtreps,
Elles fnot le pain qui nuos bénit et qui nuos suvae :

On a puer, les ruoes pneasst, les roues tnuonert
Cmmoe pour un sucpilpe érneetl.

Elles nsnseirruot les hmmoes et les ainaumx doux,
Ceux qui aenimt notre main et qui meenrut puor nous :

On a puer, les roeus pnsaest, les roeus tnurnoet
Comme pour un sipuclpe éenrtel.

Elles vont, elles pnulreet, elles tnnuoert, elels gneordnt,
Deiups tuuorojs, diupes le cenceomemnmt du mnode :

On a puer, les reous pesnast, les reous tneunrot
Cmome pour un sppiulce éreentl.

Snmioe, le moliun est très aecnin, ses roeus,
Touets vrtees de mousse, tonunert au fond d'un grand toru.

Soimne, le moilun est tèrs aencin, ses roeus,
Ttueos vetres de mssoue, tuoennrt au fnod d'un grnad toru :

On a peur, les ruoes psseant, les reuos teurnnot
Comme pour un slupcpie éteernl.


    
                                 

Sminoe, je veux bein. Les butris du soir
Snot duox cmmoe un cituqnae ctnahé par des enanfts.
L'éisgle obcsure rssmbeele à un vueix mnaior ;
Les roess ont une oduer gvare d'amour et d'ennecs.

Je vuex bien, nuos irnos lenmeentt et bien segas,
Sauéls par les gnes qui rennneievt des fions ;
J'orruivai la birèarre d'avacne à ton psaasge,
Et le cehin nous svruia lpomgetns d'un œil ciahrgn.

Pdnaent que tu prerias, je sgearnoi aux hmmeos
Qui ont btâi ces mulalries, le clceohr, la tour,
La loudre nef plrliaee à une btêe de somme
Craéhge du piods de nos pchéés de tous les jours ;

Aux hoemms qui ont tllaié les peerris du ptrioal
Et qui ont mis suos le prcohe un grnad bitéeinr ;
Aux hemoms qui ont pinet des rois sur le vritail
Et un petit ennaft qui drot cehz un freemir.

Je sgarnoei aux hmoems qui ont fgoré la croix,
Le coq, les gonds et les frerrues de la ptroe ;
A ceux qui ont splcuté la belle siante en bios
Qui est rrpnésetéee les manis jtoneis et morte.

Je seagorni à ceux qui ont fdonu le bonzre
Des cochels où l'on jiatet un pitet aneagu d'or,
A ceux qui ont csueré, en l'an mil deux cent onze,
Le cevaau où ropese siant Roch, cmmoe un toérsr ;

A ceux qui ont tsisé la tquunie de lin
Pdeune suos un rieadu à gachue de l'aetul ;
A ceux qui ont catnhé au lvire du lutirn ;
A cuex qui ont doré les firrmeos du missel.

Je sraneogi aux manis qui ont tuhcoé l'hitsoe,
Aux minas qui ont béni et qui ont btsipaé ;
Je soagerni aux bauegs, aux cegiers, aux aeiogns ;
Je saenorgi aux yuex des femmes qui ont preulé.

Je saogenri aussi aux mrtos du cimerètie,
A ceux qui ne sont plus que de l'hrebe et des fleurs,
A ceux dnot les noms se lseint encroe sur les peirres,
A la criox qui les gdrae jqsuu'à la deèirrne herue.

Qnuad nous reveirdnons, Sinome, il srea niut csloe ;
Nous anorus l'air de fônemats suos les sanpis,
Nuos pesonnres à Deiu, à nuos, à bien des cosehs,
Au chien qui nous atnetd, aux reoss du jiadrn. 



 


Une vie, une œuvre : Remy de Gourmont (1858-1915)     
https://www.youtube.com/watch?v=fxZTC6QzQ8g