31/07/2006

Après dissipation des brunes matinales

Et d'abord il existe un grand nombre de corps qui mettent à la portée de nos sens leurs émanations : les unes se détachent pour s'évanouir en tous sens, comme la fumée du bois vert ou la chaleur du feu ; les autres sont d'une contexture plus serrée, comme les rondes tuniques que les cigales déposent à l'été, comme la membrane dont se débarrassent les veaux naissants ou la robe que le serpent abandonne en glissant au milieu des ronces : nous voyons souvent cette dépouille flottante suspendue aux buissons.



En outre, si toute odeur, fumée, chaleur et autres effluves semblables se dissipent en se répandant hors des corps, c'est que venant jusque des profondeurs, ils se divisent dans les sinuosités du parcours et ne trouvent pas d'issues directes pour faire une sortie d'ensemble. Au contraire, la membrane délicate des couleurs émises d'une surface, ne court aucun risque d'être déchirée, puisque sa place au premier plan lui assure un libre départ.



Enfin dans les miroirs, dans l'eau, dans toute surface polie, nous apparaissent des simulacres qui ressemblent parfaitement aux objets reflétés et ne peuvent donc être formés que par des images émanées d'eux. Pourquoi admettre de telles émanations qui se produisent manifestement pour un grand nombre de corps, si l'on méconnaît d'autres émanations plus subtiles ? On ne saurait répondre.

28/07/2006

Bien plus qu'hier et encore d'avantage

Afin d'éprouver ses disciples, maitre Chù disait :
- Le chemin ne monte ni ne descend. Pourtant celui qui l'emprunte monte ou descend.
- Jeter une pierre est aussi important et inutile que de la ramasser.
- Une belle jeune fille est un chaudron gluant.
- Un rat connait le chemin de sa tanière. La tanière ignore le chemin du rat.
- Si vos étiez né vous ne seriez pas ici.
- Certains arrivent avant d'être partis? C'est la meilleure voie.
- La musique assourdit l'oreille. Elle n'entend plus le silence.
- Le désir d'un chien équivaut à celui d'un singe. Celui d'un singe à celui de Yen Ying. Celui de Yen Ying à celui de Tse-kong. Celui de Tse-kong à celui de n'importe qui. C'est que le désir ne vaut rien autant alimenter les canards.
- Permettre ou interdire n'ajoute rien aux valeurs.
- Votre genou voit-il quoi que ce soit?
- Lorsque vos yeux seront éteints, vous ne verrez pas davantage.
- La bêche n'est pas plus noble que la terre.
- S'éprendre d'une idée est aussi vain qu'adorer une brique.



Les disciples passaient des heures à discuter entre eux de ces paroles. A la fin, maitre Chù leur disait :
- N'êtes-vous pas stupides de vouloir approfondir des inepties pareilles?

26/07/2006

Petite colombe, o petite colombe !

Un long voile de gaze mauve, transparente, pailletée d'argent, jeté sur un foulard de soie vert tendre, encadrant un visage pâle, ovale, ombrant la peau veloutée et l'éclat des longs yeux sombres; dans le lobe délicat des oreilles, deux grands cercles d'or ornés d'une perle tremblante, d'un brillant humide de goutte de rosée; sur la sveltesse juvénile du corps souple, une lourde robe de velours violet, aux chauds reflets de pourpres et, pour en tamiser et adoucir le luxe pompeux, une mince tunique de mousseline blanche brodée. Finesse des poignets, chargés d'or et d'argent ciselé, ou saignent des incrustations de corail; attitudes graves, sourires discrets, beaucoup de tristesse inconsciente souvent, gestes lents et rythmés, balancement voluptueux des hanches, voix de gorge pure et modulée : Fathila Zohra, danseuse du Djebel-Amour.

20/07/2006

Another day in paradise

You are beautiful

D'un gradin d'or, — parmi les cordons de soie, les gazes grises, les velours verts et les disques de cristal qui noircissent comme du bronze au soleil, — je vois la digitale s'ouvrir sur un tapis de filigranes d'argent, d'yeux et de chevelures.

Des pièces d'or jaune semées sur l'agate, des piliers d'acajou supportant un dôme d'émeraude, des bouquets de satin blanc et de fines verges de rubis entourent la rose d'eau.

Tels qu'un dieu aux énormes yeux bleus et aux formes de neige, la mer et le ciel attirent aux terrasses de marbre la foule des jeunes et fortes roses.

19/07/2006

Damoclès Siriel

Quand à mon couteau, dépositaire du sang de plusieurs meurtres et fauteur de cet ultime trouble, je le garderai précieusement, parce que lui seul me permettra, mes vivres épuisés et mon bateau perdu, sans doute pour toujours, dans le marécage fluide des vagues, d'échapper à l'esclavage ignoble de la mort en mettant fin à mes jours moi-même, d'une façon à la fois géométrique et royale, la garde du poignard enfoncé dans ma chair figurant à jamais sur mon coeur une croix, signe plus noble que tous les crucifix de malheur, parce qu'aucun homme n'y est par la pitié cloué et qu'elle reste ainsi une pure étoile métallique aux branches cristallinement tendues de l'un à l'autre bord.

10/07/2006

Des rayonnements originaires

Yogindu dit:
Lumière qui n'est même pas.
Luminosité sourde qui ne naît pas par répercussion ni par réfraction ni par distillation.
Lumière d'aucun étant, qui ne ce rencontre dans rien de ce qui est.
Lumière du pré-être.
Lumière qui illumine l'au-dela du soleil.
Lumière de la lucidité.
Le plus vieux soi est joie des Retrouvailles. Cette joie jette une lueur que toute joie retrouve.
Yogindu a écrit :
La joie a son séjour dans la pensée de façon brusque, comme l'oiseau migrateur voyant le lac tout à coup.
La joie de celui qui contemple ce qui le précéda est exactement semblable à la joie de la nuit dans le ciel pur



La source pré-ruisselante diffuse une" lumière sourde" au fond de chaque être. Cette lumière sourde peut-être aperçue au fond des yeux des enfants, à la surface des yeux des femmes qui jouissent et aussi, très loin, au tréfonds des yeux des vieillards quand ils ont perdu toute mémoire

09/07/2006

Une seule goutte de jadis inonde l'univers

Soudain leurs yeux quittaient le monde, leur tête se renversait en arrière et leur corps crachait comme un animal furieux



Je sens ici
la chair humaine
Si tu ne me la donnes pas,
c'est toi que je mangerai...



Lorsque nous étions fiancés
dans la blancheur du printemps,
les sabots de ton cheval
étaient des sanglots d'argent...

07/07/2006

Nouvelles instructions aux combattantes

LOUVES ECARLATES RESTITUEZ VOS SAVOIRS ECARLATES!

LOUVES ECARLATES INSPIREZ NOUS!

ATTENDS LES SURVIVANTES DERRIERE TON MASQUE!

SI ON TE DECHIRE AVEC TON MASQUE, TRAHIS, APPELLE LES LOUVES ECARLATES!

SI ON TE DECHIRE SANS TON MASQUE, REGAGNE LES RIVAGES BLESSÉS!

REGAGNE LES RIVAGES BLESSÉS, PENDS TOI AVEC TA CEINTURE!

FEU SUR LA RUCHE NUMBER NINE!

CHRYSALIDE SOUS LES FLAMMES, TON VISAGE S'APPELLE MERVEILLE!

FLAMMES SOUS TON MASQUE, ARRACHE TON MASQUE!

NULLE FLAMME AU MATIN NE TE DEFIGURE! NUL FEU AU SOIR NE T'ENLAIDIT!

TON VISAGE S'APPELLE SPLENDEUR, TON VISAGE S'APPELLE DESTIN!

PENSE AUX LOUVES TRÈS ROUGES, PENSE AUX SAVOIR ETRANGES!

APRÈS TON MASQUE, UNE MERVEILLE PURE!

UNE CHRYSALIDE SANS VISAGE, UNE BARCASSE SANS ÉQUIPAGE!

UNE CHRYSALIDE ENLAIDIE, TROIS COMPAGNIES SOUS LA MOUSSE NOIRE!



UN JOUR NOUS DORMIRONS SANS METTRE VOS VISAGES!

UN JOUR NOUS AURONS BIEN VÉCU!

UN JOUR NOUS SERONS MAITRES DES PASSAGES!

UN JOUR NOUS AURONS AIMÉ LES SEPT COEURS!

UN JOUR NOUS ENTRERONS DANS LES MAISONS ORANGES!

UN JOUR NOUS AVEC LES MAINS NOUS FINIRONS L'IMAGE!

LES MAUVAIS JOURS FINIRONT!

03/07/2006

Que n'ai-je vu Méduse au lieu de son visage?

Les Satyres ont poursuivi dans les bois
Les pieds légers des oréades.
Ils ont chassé les nymphes sur les montagnes,
Effarouché leurs sombre yeux,
Saisi leurs chevelures comme des ailes,
Pris leurs seins de vierge à la course
Et courbé leurs torses chauds à la renverse
Sur la mousse verte humectée,
Et les beaux corps, les beaux corps semi-divins
S'étiraient avec la souffrance ....



Il est écrit :
De ces trois jours de passion, il veut garder un souvenir qui durera plus que lui-même, - mettre à nu l'attitude violente ou il l'a vue en songe, et créer d'après le cadavre la statue de la Vie Immortelle.
Il jette sur la table la motte d'argile humide. Il la presse, il l'allonge selon la forme humaine; une sorte de monstre barbare naît de ses doigts ardents.
Il regarde.